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Plutôt que des « mesures parcellaires et éclatées », une quarantaine d’associations et de fédérations féministes et de protection de l’enfance réunies en « coalition » ont réclamé « une loi globale », vendredi 18 octobre. « Comme associations de terrain, nous identifions 130 mesures dans les domaines de la prévention, de l’éducation, de la police, de la justice, de la santé », explique Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, à l’Agence France-Presse (AFP).
Dans le contexte des procès des viols de Mazan et des révélations sur l’abbé Pierre, et à la veille de rassemblements organisés samedi devant les tribunaux à travers la France pour soutenir les victimes des violences sexuelles, ces organisations souhaitent légiférer, dans un texte unique, contre « l’industrie pornocriminelle » et « la culture du viol en ligne », pour le repérage de l’inceste lors d’« entretiens individuels annuels » avec les mineurs ou encore pour des soins de psychotraumatisme pour les victimes remboursés à 100 %.
Les associations féministes « peuvent avoir des points de vue différents, par exemple sur la question du consentement, mais elles sont d’accord sur le fait que rien ne changera sans une approche globale, mieux financée et centrée sur les victimes », explique Mme Mailfert. L’investissement nécessaire contre les violences physiques, conjugales et sexuelles est évalué par la coalition à 2,6 milliards d’euros par an, dont 332 millions destinés en particulier aux violences sexuelles.
Une cinquantaine d’organisations féministes, étudiantes (Union nationale des étudiants de France, Fédération des associations générales étudiantes) ou politiques (La France insoumise, Parti communiste français) appellent à des rassemblements samedi pour soutenir Gisèle Pélicot, droguée aux anxiolytiques et violée par son mari et des dizaines d’inconnus recrutés sur Internet à Mazan (Vaucluse), et plus largement toutes les victimes de violences sexuelles. D’Avignon à Toulouse, de Nice à Narbonne, en passant par Paris, Lyon, Marseille ou Clermont-Ferrand : des rassemblements sont prévus devant des palais de justice d’une vingtaine de villes.
« Procès des violeurs de Mazan, révélations sur l’abbé Pierre, viol suivi du meurtre de Philippine : chaque jour qui passe nous montre à quel point la culture du viol imprègne notre société et à quel point l’impunité des agresseurs est forte », écrit Osez le féminisme. L’objectif est de « demander à la justice de faire son travail », explique Elsa Labouret, porte-parole de l’association, à l’AFP.
Quelque « 94 % des affaires de viol ont été classées sans suite en 2020 », déplore la coalition, se référant à une étude de l’Institut des politiques publiques publiée au printemps 2024. Les chiffres communiqués vendredi par la chancellerie diffèrent toutefois : « Les affaires de viols portées à la connaissance de la justice sont passées de 13 000 en 2017 à 23 500 en 2022. Cette année-là, 68 % de ces procédures transmises au parquet ont été jugées non poursuivables, après examen par un magistrat, sur des critères juridiques », selon le ministère.
« Face à une institution [judiciaire] en manque cruel de moyens et marquée par les préjugés sexistes, nous avons besoin d’un changement profond de la manière dont les viols et violences sexuelles sont jugés en France », ajoutent les membres de la coalition. Pour chaque plainte déposée, les féministes demandent ainsi que « certains actes d’enquête soient obligatoirement réalisés dans un délai raisonnable ».
« Il y a beaucoup de classements sans suite par manque de preuves, parce qu’on ne mène pas l’enquête. On ne recherche pas les preuves, le suspect n’est pas systématiquement convoqué, on n’interroge pas son entourage, on ne vérifie pas s’il y a dans son ordinateur des images inquiétantes », affirme Laura Slimani, directrice projets à la Fondation des femmes. C’est en examinant l’ordinateur de Dominique Pélicot, arrêté alors qu’il filmait sous les jupes de clientes de supermarché, que les enquêteurs ont découvert les centaines de vidéos et de photos documentant les viols qu’il orchestrait contre sa femme.
« Beaucoup de viols ne sont plus jugés devant les jurés populaires des assises mais par des juges professionnels des cours criminelles départementales. Les crimes “les plus graves” continuent d’être jugés en assises. C’est donc que le viol n’est pas grave ? », s’interroge Mme Mailfert.
Le Monde avec AFP
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